7 de julho de 2014

Lacan Quotidien n° 412


LU CE JOUR, par Éric Laurent

24 juin 2014
Retour à Monsieur Bovary
La ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, grande voix de la bureaucratie, sœur d’un professeur de médecine, flle d’Alain Touraine, normalien, sociologue de l’action sociale, lui même fls de médecin, vient de présenter les grandes lignes de la loi de Santé qui sera présentée au Parlement début 2015. Un tollé s’ensuit sur la généralisation du tiers-payant prévue pour 2017. Ce tollé est diversement commenté. Le Monde donne la parole aux opposants, Libération est à fond pour.

Lu dans Libération du 24 juin 2014, l’article d’Eric Favereau, « Médecins : le tiers payant divise » :
 « La généralisation du tiers payant d’ici 2017, confrmée la semaine dernière par la ministre de la Santé, Marisol Touraine, est une mesure de bon sens. D’autant que dans la quasi-totalité des pays de l’OCDE, elle est déjà effective. Aux États-Unis, la plupart des assurances privées en font bénéfcier leurs adhérents. On pouvait donc imaginer un concert d’applaudissements. Raté. Voilà que cette mesure provoque un tollé dans une grande partie du corps médical. « Notre avenir est en jeu », osent même certains. Rien que ça… Didier Tabuteau, responsable de la Chaire santé de Sciences-Po, ajoute avec force : « Oui, généraliser le tiers payant est une mesure fondamentale. Cela marque un changement historique. » La Chaire de Santé de Sciences-Po est certainement une grande inspiratrice de la mesure cruciale. Il sufft de se reporter au dernier livre de son responsable, qui ne cache pas sa nostalgie des Offciers de Santé, créés par la Révolution en 1793, pour suppléer aux trop peu nombreux Médecins. Flaubert, fls de médecin, a fait de M. Bovary un Offcier de santé inoubliable.

Lu dans Démocratie sanitaire, de Didier Tabuteau, éditions Odile Jacob, 2013 : 
« Alors que, dans la plupart des pays européens comparables, les médecins et les administrations se sont peu ou prou associés pour développer la santé publique puis une assurance-maladie, l’opposition entre les deux a servi, en France, de ferment à la structuration du système de santé. L’identité collective des médecins a pris racine sur le refus de l’inférence administrative, sur la méfance à l’égard des collectivités publiques et sur la sacralisation de l’isolationnisme professionnel. L’intrusion de l’État dans l’exercice de la profession est devenue l’obsession majeure d’un corps médical échaudé par l’initiative des révolutionnaires de 1793…Il a fallu la loi du 30 novembre 1892, adoptée au rapport d’Antoine-Daniel Chevandier, député et « docteur-médecin », pour qu’il soit mis fn à la dichotomie du corps médical et que soit réservé aux titulaires du doctorat le droit d’exercer de la médecine. Le bras de fer historique entre l’État et les docteurs en médecine a tourné à l’avantage de ces derniers. Au-delà de la mise en extinction de la profession d’offcier de santé, c’est la répartition des pouvoirs dans l’organisation du système de santé qui s’est jouée »

La bureaucratie sanitaire a la mémoire longue.
25 juin 2014
La confusion entre signaux électriques du cerveau et pensée est une métaphore toxique

La Recherche de juin/juillet titre : « Piloter la machine par la pensée ».

Lu sur le site de Time Magazine, en date du 25 juin, l’article de Maya Rhodan, « New Technology Helps Brain Signals Move Paralyzed Hand » :

« A quadriplegic man was able to move his hand simply by willing it to happen with his mind…23-year-old Ian Burkhart, paralyzed in a diving accident four years ago, was the first participant to try out a decade-in-the-making technology called Neurobridge, which sends neural signals directly to muscles. »

26 juin 2014
La forclusion pour tous par le triomphe des images.
Sous le titre « Cauchemars enfn expliqués », Science et Vie nouvelle formule, de juillet 2014, (signalé par Francis Donovan), annonce que le cauchemar, considéré comme « un simple symptôme par la psychanalyse », est devenu « un sujet scientifque à part entière ». Et qu’une thérapeutique souveraine en découle. Elle passe par « l’imagerie mentale ». Quid ?

Lu dans Science et Vie, l’article « Cauchemars : il est possible d’en guérir » :
« Depuis une dizaine d’années, une technique a pleinement prouvé son effcacité : l’IRT  (Imagery Rehearsal Therapy, ou thérapie par répétition de l’imagerie mentale). […] Le patient, détendu, raconte son cauchemar au thérapeute, qui lui demande de changer un élément du récit pour le rendre moins angoissant ; puis d’en modifer un autre détail, et encore un autre, jusqu’à ce qu’à force de répétitions et de légères modifcations, une « version altérée » du cauchemar s’imprime dans le cerveau. » [ Jusque là, on ne voit pas très bien la différence avec le fait de raconter en psychanalyse un cauchemar, surtout que l’article précise. ]

« C’est aussi une leçon de toutes ces études : raconter son cauchemar, l’écrire ou le dessiner, est le premier pas pour s’en débarrasser. Et cela vaut pour les cauchemars pathologiques comme pour les plus « ordinaires » ».

[ Moyennant quoi, les héritiers de Michel Jouvet, qui a cherché toute une vie, en
vain, à établir une explication du rêve, vont : ]

« évaluer l’impact de cette méthode de répétition de l’imagerie mentale sur des patients adultes français, faisaient fréquemment de « mauvais rêves ». Une première en France.

Pour l’instant, en effet, pour expliquer l’effcacité de cette thérapie, trois processus sont envisagés : soit elle améliore les capacités d’imageries mentales du patient, c’est-à-dire ses compétences à produire un « scénario visuel », soit elle arrive à créer de nouveaux scénarios moins pénibles. Enfn, dernière hypothèse, l’IRT exposerait régulièrement le dormeur à des souvenirs anxiogènes, ce qui fnirait par éteindre la réponde émotionnelle  associée ».

[ Nos expérimentateurs reconnaissent volontiers que les thérapeutes font de l’IRT, mais sans le savoir. ]

« Seul un entretien intime avec le rêveur permettra de dénouer le jeu subtil des métaphores propres à chaque cerveau. Interpréter ses cauchemars reste malgré tout utile. « Car lorsqu’un thérapeute demande à un patient d’interpréter son cauchemar, celui-ci va élaborer un scénario alternatif. Et donc, faire de la répétition d’imagerie mentale sans que ce soit mentionné comme tel », explique le psychologue, qui voit donc dans cette pratique l’occasion de faire un vrai travail cognitif sans en avoir l’air ».

Pour l’amour des métaphores du cerveau, souffrez que l’on vous  embrasse !

Lacan Quotidien n° 412

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